Volutes de fumées qui se dessinent sous ses yeux avec délicatesse et volupté. Elle laisse son regard se perdre dans les méandres blanchâtres qui s’envolent sous ses yeux, laisse son esprit se vider à mesure que la nicotine s’insinue dans ses veines. Moment de calme et de tranquillité qu’elle s’octroie régulièrement, surtout depuis la rentrée. Loin d’être des plus sociables, les mondanités imposées par l’académie l’épuise plus qu’autre chose. Sans parler de sa chère et tendre pseudo-soeur qui ne peut s’empêcher de baver à son sujet, telle une putain de vipère. Et n’oublions pas ce connard de frenchie qui ne peut s’empêcher de lui prouver par a plus b qu’il a raison, et qu’elle a tort, dans à peu près tout ce qui peut concerner le Clayesmore Post. Dire qu’elle était libre de faire ce qu’elle voulait d’un point de vue photo avant que cet imbécile ne débarque… Si seulement elle pouvait se barrer de cette école, s’enfuir, loin, retourner en Alaska, près de sa mère. Ou plutôt, de ce qu’il en reste. Gamine coincée dans ce coin du pays qu’elle abhorre, dans cette famille recomposée qui ne veut pas d’elle, dans cette école où elle ne trouve pas sa place, si tant est qu’elle en ait une quelque part. Assise par terre sur le toit de l’école, la porte bloquée par une cale pour ne pas rester enfermée dehors, elle savoure le néant qui s’installe petit à petit en elle à chaque bouffée d’air enrichi au goudron. Et elle pourrait presque enfin réussir à se détendre, à laisser l’anxiété disparaître au profit d’une langueur intoxiquée, si tant est qu’on ne la dérange pas. Chose qui ne tarde pas d’arriver. Grincement de la porte dans ses gonds qui vient la tirer de sa méditation illégale, ses iris se tournent non sans un regard assassin vers celui ou celle qui ose venir la troubler dans son recueillement. Luke. Evidemment. Qui d’autre que cet imbécile fini pour non seulement débarquer sur le toit, mais en plus déplacer la cale du pied sans s’en rendre compte. “Attention la…” Fin de phrase qui disparaît dans un soupir exaspéré, les billes roulent vers le ciel alors qu’un claquement sonore retentit, sonnant par là même leur emprisonnement sur le toit. Elle souffle, râle, la langue qui vient claquer contre le palais pour souligner l’absurdité de la chose. “Putain, Luke, tu peux pas te servir de tes deux neurones de temps en temps ? Y a trop de vide dans ton crâne pour qu’ils arrivent à se trouver ?”